En décembre 2014, je suis partie au Sénégal avec Yama Wade, Reine de Sabar, pour faire un stage de danse, voici ce que j’ai découvert sur le sabar. La réflexion qui suit est un début de compréhension et il est fort probable que cette vision évolue.
J’espère que ça vous donnera envie de D A N S E R !
Une conversation en musique
Le sabar désigne à la fois un instrument : une percussion en bois, et une danse sénégalaise. Le sabar se distingue des autres danses de l’Afrique – la respiration requise par le rythme est différente, le temps ou l’accent est « en l’air ». De plus, c’est une véritable rencontre entre le musicien et le danseur. Les deux conversent via la musique et cette discussion est complètement unique car improvisée dans « ici et maintenant ». Le musicien parle grâce au son du tambour, le danseur s’exprime via « la respiration » de ses pieds, de ses poignets, de ses bras et de ses genoux. Le sabar englobe un ensemble de codes et de règles, offrant une multitude de possibilités à toute personne sensible à son rythme.
Beaucoup plus que la danse
Ce que j’aime en particulier dans le sabar, c’est son côté mystique car c’est plus qu’une danse ou un ensemble de mouvements rythmés. Ce qui compte c’est la justesse des mots, l’énergie, le ressenti, l’intention, l’honnêteté d’expression, l’authenticité de la rencontre, la respiration, l’irrationnel… Si ces éléments sont réunis la danse devient juste, claire et élégante. L’énergie est à la fois puissante et légère, une certaine flexibilité et élasticité se ressentent ; rien n’est forcé, le danseur ne fait pas d’effort mais se laisse guider pas son intuition et son ressenti, ses tripes et son inconscient. Par ailleurs, seule la décision d’aller à la rencontre de l’autre, en se laissant guider par son inconscient, permet de respecter le temps musical : dès que la tête prend le dessus, le corps s’arrête. La réflexion tue l’expression juste et spontanée de l’âme, de l’inconscient, de l’énergie vitale du danseur. En même temps, le danseur, aussi irrationnel soit-il, se doit de respecter les règles et contenir la force qui le traverse, sinon son langage devient éparpillé, saccadé, imprévisible et incompréhensible ; ses phrases n’ont plus de sens.
Le sabar, utilisé jusqu’à aujourd’hui à des fins thérapeutiques, dépasse la notion de la danse, c’est une démarche globale : philosophique, psychologique et spirituelle.
Le sabar aide le danseur à trouver les trésors enfouis dans son cœur, il nettoie les émotions refoulées. Le sabar exige l’authenticité dans la relation, la clarté et l’honnêteté de la parole, une excellente connaissance de soi, l’acceptation de son côté irrationnel et de son ressenti. C’est un cheminement de toute une vie, rempli de questions, de doutes, de prises de conscience, de blocages, de surprises, d’émotions fortes, de la peur, de la joie… C’est un outil de développement personnel qui améliore la relation à soi et a à la communauté. C’est une démarche spirituelle qui permet de trouver sa place, unique et juste, dans le monde. Grâce à la pratique de sabar nous accédons à plus d’amour et plus de gratitude pour chaque respiration, chaque expérience, nous apprenons à lâcher prise, nous avons plus de confiance en la vie et en nous-mêmes. C’est une forme de méditation en mouvement qui apaise et rééquilibre, qui nettoie et qui régénère, qui soigne et qui cicatrise. C’est une expression de notre singularité car il y a autant de styles de sabar que de danseurs.
Chemin vers l’amour, vers la vie
Ce rythme touche ce qui est le plus profond dans mon être et je ne sais pas exactement comment cela s’opère. Je pressens que c’est une voie de libération et de liberté. Je pressens qu’il offre un voyage initiatique vers les tréfonds de mon âme et une sensation de lien avec le monde où l’expérience se fait à la fois dans l’individualité et dans ce qui est universel en nous, car propre à chaque être humain, voire à chaque être vivant. C’est une expression de vie et la vie m’attire, j’ai envie de mieux me connaître, de ressentir plus, d’aimer plus, de donner et de recevoir spontanément et avec joie, de voyager dans d’autres dimensions de conscience, de communiquer avec l’au-delà, oui, c’est beaucoup et cela paraît bizarre, même pour moi qui l’écris. Le sabar nous met en contact avec une force incompréhensible qui nous dépasse et qui nous fait peur, et pourtant, elle coule dans nos veines : c’est elle qui nous fait respirer, malgré nous, durant chaque instant de notre vie et c’est elle qui nous accompagne en douceur jusqu’à la fin. Le sabar nous enseigne à nous aimer, à aimer les autres, à aimer la vie, à honorer ce qui est vivant en nous, à accueillir ce qui arrive, à avoir confiance, à se laisser guider par notre ressenti, à être présent, à mieux communiquer avec nous-même et avec les autres.
Les avantages sont multiples et beaucoup est demandé pour y accéder : de la patience, de la persévérance, une ouverture d’esprit, une écoute attentive, un désir ardent, une attitude de recherche d’un éternel débutant qui reste humble, curieux et confiant.
Un grand MERCI à Yama Wade, Reine de Sabar, de m’avoir éclairci sur le sabar, tel que sa grand-mère lui a enseigné et qu’elle transmet depuis de nombreuses années avec joie, passion et générosité à ses élèves. J’ai la chance d’en faire partie depuis septembre 2014 et j’inspire profondément quand je pense à tout le chemin à parcourir afin de ressentir et d’exprimer le sabar.
Pour que la force et la douceur du sabar soient avec vous !
Explorez !
Et si le sabar ne vous inspire rien du tout et que vous pensez que j’ai perdu la tête (vous n’avez pas tort), cherchez, explorez, expérimentez : la danse, le sport, l’activité, le rythme, l’occupation qui vous éveille à la vie, qui vous appelle et qui vous fait vibrer de joie, vous donne de doux frissons au dos. Une activité épanouissante vous nourrit donc bénissez et savourez ce repas sacré !
Bon vent et je vous souhaite plein d’amour sur ce chemin de découverte personnelle !
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– Qu’est-ce que vous en pensez ? Avez-vous eu des expériences similaires avec d’autres activités ?
– Pour ceux qui pratiquent le sabar, comment vous le voyez ? Qu’est-ce qu’il vous apporte ?
– Enfin, Yama, si tu lis ces mots – je pense fort à toi et je te remercie pour tes commentaires ; s’il y a des choses que je n’ai pas bien comprises, je serai ravie d’en discuter ! Jërëjëf !
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